Résumé du livre : Wall Whitman aura été en fin de compte plus prolifique comme prosateur que comme poète. Soucieux de léguer à la postérité cet important volet de sa production littéraire, il supervisera l'édition définitive de ses textes en prose en 1892, l'année même de sa disparition. Il est donc clair que pour Whitman la frontière entre prose et poésie est ténue, ce qui correspond d'ailleurs à la position qu'il revendique : "l'heure est venue (...) de briser les barrières formelles érigées entre prose et poésie." Les textes retenus ici couvrent quatre décennies de la carrière littéraire de Walt Whitman. Ils donnent la mesure d'un pan négligé et pourtant primordial de sa production : la réflexion théorique. D'une constance à toute épreuve, il associe sans relâche l'évolution démocratique de son pays au développement de la littérature américaine, au sujet de laquelle il fera preuve jusqu'à sa mort d'une férocité volontiers polémique. Les textes proposés ici (réunis de son vivant par le poète dans Recueil et par son exécuteur testamentaire à titre posthume dans Manuel d'Amérique) brossent de façon saisissante et souvent déroutante le portrait d'un penseur inflexible qui s'est donné comme mission impossible d'imposer la poésie comme pierre angulaire de l'édifice social et politique de tout un pays. A ce titre, pour créer une littérature qui puisse se présenter comme autochtone, il restait encore aux Etats-Unis, débarrassés du joug britannique, à se libérer de l'idiome hérité de l'ancien pouvoir colonial. D'où, chez Whitman, l'imbrication si intime du linguistique et du politique. C'est l'un des enjeux les plus évidents des textes de Whitman qui, le premier, mettra en oeuvre ce que, désormais, on pourra nommer l'"américanité".