Résumé du livre : Giorgio Manganelli (1922-1990) aura été au XX? siècle l'un des hardis sectateurs de la littérature absolue. Au fil des âges, de manière plus ou moins ostensible, plus ou moins insolente, des narrateurs et des poètes avaient déjà empoigné semblable gonfanon. Le lecteur, ce fin limier, les reconnaît à ce qu'ils semblent partager une intuition commune : tout ce qui relève de la recherche rigoureuse du vrai - théologique, métaphysique, scientifique - n'offre d'intérêt que si le faux peut s'en nourrir. Le faux, c'est-à-dire cette fiction parfaite qui a nom littérature. Littérature : dieu obscur et sévère, qui réclame des libations d'encre, des sacrifices rhétoriques, des mensonges exacts. En des époques lointaines, on présume qu'un Callimaque, un Gongora, peut-être même un Ovide furent des adeptes de cette ambitieuse hérésie. Il n'en demeure pas moins que personne n'avait osé la formuler jusqu'à une période récente, quand les Romantiques allemands commencèrent à désarticuler d'une main délicate les présupposés de l'esthétique. Si le caractère mensonger de la littérature serpente depuis longtemps dans les oeuvres qui emplissent nos bibliothèques et irriguent nos mémoires, c'est à Manganelli que revient le mérite de l'avoir exhibé au grand jour, d'un geste brusque et presque bureaucratique. C'est donc une lourde responsabilité qu'il a prise en intitulant La littérature comme mensonge ce recueil d'essais où l'on croise Lewis Carroll et Stevenson, Hoffmann et Nabokov, Dickens et Dumas, parmi bien d'autres. Chacun pourra le constater, La littérature comme mensonge est de ces livres qui naissent en provoquant scandale et surprise, mais dont le destin est de vivre avec la force silencieuse de l'évidence.